Raymond Rognoni dans Pièges (1939)

Une voix ronde et joyeuse

D’origine modeste, Raymond Rognoni remplit ses obligations militaires pendant la première guerre mondiale, puis se marie en 1921. Il rentre au conservatoire en 1922 et devient pensionnaire de la Comédie-Française jusqu’en 1929. On le trouvera ensuite régulièrement sur scène, dans de petits rôles au cinéma, et dans une multitude de rôles dans le doublage.

Il crée également l’école des enfants du spectacle en 1924. Un de ses élèves lui rend hommage dans son autobiographie : « mon bienfaiteur, ce comédien de la Comédie-Française, Raymond Rognoni. (…) Directeur de l’école du spectacle 24, rue du Cardinal-Lemoine à Paris, il avait ouvert les portes de son arche aux jeunes chanteurs, danseurs, musiciens ou acteurs en herbe. Rien ne semblait pouvoir égaler cette école si différente des autres. » L’auteur de ses lignes, Charles Aznavour, était reçu dans la famille de l’acteur avec sa femme et leurs deux fils, Louis et Jean.

Il nous rappelle que, pendant l’occupation, l’école a été déplacée rue Eugène-Flachat pour devenir le « Centre du spectacle ». Michel Serrault le situe ensuite Rue Blanche, où l’école déménage de nouveau après quelques années, avec Pierre Sabbagh comme chef de centre.

C’est le 20 mai 1942 que Raymond adresse au secrétariat aux Beaux-Arts un projet de réorganisation de la Comédie-Française. Il a dans l’idée de renforcer les liens entre le Conservatoire, censé devenir un vivier pour l’Odéon, lui-même alimentant le Français. À l’époque, les meilleurs acteurs se tournent vers le cinéma ou le boulevard au bout d’un ou deux ans, laissant le « Français » obligé de recruter dans d’autres troupes des acteurs sans formation classique. Si son projet n’est pas retenu à l’époque, on retrouve certaines de ses idées dans celui qui sera appliqué en 1946.

À la fin de l’année 1944, Rognoni est remplacé par Jean Meyer à la tête de l’école nous apprend Serrault. Les archives de l’école seront pillées en 1968. Son éviction est une conséquence de ses sympathies pour l’occupant. Il utilisera d’ailleurs régulièrement son talent dans plusieurs disciplines en soutien de productions nazies, à commencer par le doublage du film Le juif Süß, aux côtés de Richard Francoeur, qui double le rôle-titre.

Il restera donc trois ans en Amérique du Sud avant de revenir à Paris en 1948 où il reprendra ses activités, notamment dans le doublage, où il double souvent des hommes avec de l’embonpoint, conformément à sa silhouette. Pour Disney, il sera donc la voix de Peter Lorre dans 20 000 Lieues sous les Mers, Le roi Hubert dans La belle au bois dormant, Donald Crisp dans Pollyanna, Tommy Tweed dans L'Incroyable randonnée , et enfin le nain Joyeux dans Blanche Neige et les sept nains dans le doublage de 1962.

Raymond Rognoni travailla jusqu’à sa mort, le 26 septembre 1965 à Paris 7.

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