Information
Nom complet : Marguerite Christiane Virideau
Naissance : 13 juillet 1905 à Pessac, France
Mort : 11 août 1993 à Lamonzie-Saint-Martin, France
Mariage :
Jacques Jack Tourneur (22 avril 1935 - 19 décembre 1977)
Travail sur Blanche Neige :
Voix parlée de Blanche Neige dans la première version française (pas au générique)
Christiane Tourneur incarne le personnage de Blanche Neige dans la première version française, sortie en 1938. Elle assure le rôle parlé. Mais qui est-elle ?
Séductrice
Née le 13 juillet 1905 (1906 ?) à Pessac en Gironde, Marguerite Christiane Virideau est, à la fin des années 20, l'incarnation même de la "flapper" américaine. À l'image de Colleen Moore ou Louise Brooks, elle adopte la coiffure au carré typique de l'époque et sa voix de petite fille contraste avec sa silhouette avantageuse, laquelle attire bientôt le célèbre acteur Charles Vanel. Ce dernier, bien qu'à l'aube d'une très longue carrière, a déjà des dizaines de rôles à son actif depuis une dizaine d'années, mais il se lance dans la réalisation de ce qui restera son unique long métrage, Dans la nuit.
Figurante
Dans ce film sorti en 1930, bien qu'elle ne soit pas créditée au générique, Christiane, devenue la petite amie de Vanel, est clairement la figurante la plus en vue sur la charrette des mariés. Ce n'est pas là sa première apparition à l'écran : elle a semble-t-il débuté dans une comédie de Robert Saidreau intitulée Monsieur le Directeur en 1925 !
Mais en 1930, le cinéma sonore prend de plus en plus de place en France.
Tourneur père
Charles Vanel l'embarque à bord du tournage de son film suivant, Accusée levez-vous! où il joue le mauvais garçon dans ce premier film parlant du très célèbre réalisateur Maurice Tourneur, alors fraîchement revenu d'une brillante carrière aux États-Unis. Dès la première scène du film, le film sonore permet à Christiane de se faire reconnaître aisément comme jamais auparavant grâce à sa marque de fabrique : une voix enfantine dont elle use accompagnée d'une moue boudeuse pour se plaindre que son costume de nénuphar n'est pas prêt, un prétexte pour apparaître fort dévêtue sur scène.
Au grand dam de Vanel, Christiane devient alors l'amante de Maurice qui lui donne ensuite des rôles de plus en plus importants dans ses réalisations.
Elle tourne ensuite avec Jean Gabin un de ses rôles les plus bavards : l'amie vendeuse de Gaby Basset dans Chacun sa chance. Elle n'y est créditée que par son prénom et apparaît dans la presse sous le nom de Christiane Veridean.
Tourneur fils
Le film suivant de Tourneur s'intitule donc Maison de danses, et en troisième position dans le magazine Comœdia qui annonce la sortie du film en février 1931, on trouve l'actrice "Christine Virideau" [sic]. Christiane fait également partie du film suivant, Partir. Dans ces deux films, elle apparaît bien placée au générique comme Christiane Virido, malgré des rôles sans éclat. Au cours de ces tournages, elle se rapproche de plus en plus d'un des collaborateurs de Maurice : son propre fils Jacques, qui alterne les postes d'assistant réalisateur, monteur, etc.
Elle finit par quitter Maurice pour son fils, lequel a déjà réalisé son premier long métrage et sort le second, Toto, avec Albert Préjean en vedette en 1933. Pendant ce temps, Christiane tourne quelques panouilles, notamment un rôle de vendeuse au côté d’Annabella dans Paris-Méditerranée, et des rôles plus substantiels dans Grains de Beauté, de Pierre Caron, et toujours sous le nom de Christiane Virido, Cognasseoù elle joue la fille du célèbre Tramel.
Selon Maurice Bessy, elle a joué dans la pièce de Jean de Létraz "Bichon" mais son nom n'est pas mentionné dans le journal.
L'Amérique
En 1934, alors que la relation père-fils a vraisemblablement souffert de leurs rapports avec Christiane, Jacques part avec son film Toto à la conquête de l'Amérique, comme l'avait fait son père avant lui. Il quitte le port du Havre sur le SS French Oregon le 4 septembre 1934 et termine son voyage à Los Angeles le 29 septembre 1934. Il avait été naturalisé le 28 janvier 1921. Christiane obtient son passeport à Paris le 2 septembre et embarque sur le SS Gerolstein. Elle atteint New York le 1er octobre et le couple vit au 610 Pacific Mutual Building, 523 West Sixth Street, Los Angeles, Californie. Ils se marient le 22 avril 1935. La même année, Christiane joue (en français) une actrice française au début de Going Highbrow, et elle enchaîne quelques rôles de françaises (Society Smugglers) pendant que son mari se fait engager à la MGM pour réaliser des courts-métrages, dont L'épopée du radium, dont le rôle de Becquerel est tenu par André Chéron, future voix de Grincheux et du chasseur.
Blanche Neige
Alors que la version française de Blanche Neige est mise en chantier, on fait le tour des actrices francophones à Hollywood susceptibles de prêter leur voix à l'héroïne. L’exubérante femme du réalisateur Jacques Tourneur apparaît alors comme un excellent choix. Son timbre marie avec bonheur la jeunesse et la bonne humeur de la petite princesse.
Mais plus encore que l'artiste américaine (qui participera aux festivités des ressorties), l'artiste française restera dans l'ombre du grand public. Tout d'abord parce que telle était la volonté de Walt Disney qui souhaitait préserver la magie des coulisses et donner une existence propre à ses personnages, mais aussi semble-t-il parce que la qualité de l'enregistrement de la version française n'a pas complètement satisfait le studio. Ainsi, et contrairement à ce qui a été fait avec les versions en langues anglaise et espagnole, aucun disque de la bande originale française n'est jamais sorti.
Ainsi, mis à part de très rares entrefilets dans la presse, le nom de Christiane n'a jamais été communiqué. Pire : d'autres noms plus en vogue ont circulé, comme ceux de Lily Pons, Sim Viva, ou des chanteuses qui ont enregistré des disques des chansons du film comme Lucienne Dugard ou Élyane Célis. Et ceux-ci ont supplanté la véritable interprète dans l'esprit de tous ceux qui se sont jamais donné la peine de se demander qui avait interprété Blanche Neige. Il est à noter que le rôle chanté est assuré par une autre artiste, Beatrice Hagen.
Après Blanche Neige
Christiane, après avoir demandé en 1939 la naturalisation américaine et l'avoir obtenue en 1940, tournera encore plusieurs petits rôles dans des longs métrages de guerre où la demande d'acteurs francophones la tient occupée quelque temps. On la trouve ainsi dans Tonight We Raid Calais et Paris à l'aube. Jacques et Christiane ont alors déménagé au 4238 Beeman Street, à North Hollywood, en Californie.
Ce seront là ses dernières apparitions. En 1942, Jacques Tourneur réalise La féline, et sort ainsi de la relative obscurité où il végétait. Dès lors, sa carrière éclipse largement celle de sa femme dont on oubliera presque qu'elle a jamais été actrice. À sa retraite, ils reviennent tous deux en France et s'installent à Bergerac où ils finiront leurs jours. Christiane survit à son illustre mari et meurt le 11 août 1993 à Lamonzie-Saint-Martin en Dordogne.